Carnet de voyage en Syrie & Jordanie (5 semaines) - Lataquié, Chateau de Saone (saladin) & Tartous

Alep – Château de Saône – Tartous

Courte nuit de 2h à peine avec un réveil bien matinal à 4h du matin, de quoi être prêt pour l'appel à la prière. Encore une fois, je suis obligé de réveiller le veilleur pour sortir. Cette fois je n'ai pas de problème pour trouver la gare et je suis même assez en avance pour prendre le train pour Lattaquié. Je prends donc mon billet 1ère classe pour le train de 6h (65LS) mais je dois attendre dans le hall alors qu'il fait bien meilleur sur le quai. J'en profite pour admirer une nouvelle fois le magnifique hall de la gare et ses peintures liées au chemin de fer. Pendant ce temps là, deux employés vêtus en bleu s'activent pour balayer le marbre alors qu'il n'y a absolument rien sur le sol marbré, on pourrait déjeuner dessus sans problème !

Finalement nous sommes autorisés à accéder au quai puisque notre train est prêt. Vu les prix du billet pour Lattaquié, tous les Syriens semblent voyager en première classe (5 wagons), il y a un seul wagon de 2nde classe. Le voyage se passe rapidement, je somnole car le paysage n'est pas aussi transportant que je l'avais imaginé et la courte nuit de la veille se rappelle à moi.

Arrivé à Lattaquié un peu après 9h, je file de suite en direction du grand stade pour trouver la station des minibus. Chemin faisant, je m'arrête à l'office du tourisme pour obtenir quelques renseignements sur le château de Saladin et les prix du transport entre le village de Al Haffé et le château (50LS A/R). Mal réveillé, je paie deux places dans le minibus (moi et mon sac). A peine arrivé, la négociation débute avec un syrien qui me propose finalement de m'emmener pour 50LS au château. Pour moi il est bien entendu que ce prix est valable pour les deux trajets. Ce n'est pas ce que comprendra mon chauffeur au retour, mais bon il sera sympa au final. En fait de moyen de transport, c'est une moto que j'utilise et ce n'est pas très évident d'être passager avec un sac à dos de 15kg dans le dos et un petit sac à dos à un bras, je joue les funambules tout au long des 6km du trajet qui ressemble aux montagnes russes. Au pied du château, le motard propose de venir me chercher 2h plus tard. No problem ! Mafi Mouchekala !

Le gardien me fait grâce des 15LS d'entrée au tarif étudiant car il n'a pas de monnaie. Je dépose mon gros sac à l'entrée pour visiter le château de façon plus légère. Le site en lui-même est en ruine seule la partie Nord est encore debout après quelques restaurations, restaurations qui se poursuivent dans la partie centrale du château. Quoiqu'il en soit le site est très grand (700m de long sur 120m de large), c'est la plus grande forteresse croisée.

Le château est situé sur un éperon rocheux et il a fallu détacher la forteresse de la montagne sur un de ses flancs non protégés. Ce fossé est large de 15m, haut de plus de 30m et long de 155m, on a beaucoup de mal à imaginer un tel travail possible par le simple travail à la pioche de tous les habitants de la région réquisitionnés pour l'occasion. Au milieu du fossé, une pile a été laissée, elle servait à soutenir le pont levis. Dès que des ennemis s'approchaient du château d'un peu trop près, les croisés enlevaient les pierres situées au sommet de la pile et le pont levis s'effondrait.

Château de Saladin : Le fossé

A droite de l'entrée, on se dirige vers des tours de défense carrées, bâties par les croisés.

Château de Saladin : Les tours

Les écuries se trouvent entre les deux tours, elles sont composées d'une vaste salle aux énormes piliers. Un peu plus loin, l'entrée du donjon et au rez de chaussée une immense salle, un immense pilier contient un escalier secret dont l'accès a été malheureusement scellé pour plus de sécurité. Cet escalier permettait de relier le sommet du donjon à la rivière située 30m plus bas. Du haut du donjon et par temps clair on peut voir la mer Méditerranée.

Château de Saladin : La partie sud

Après la prise du château aux croisés par Saladin, celui-ci fait immédiatement construire à l'intérieur du site une mosquée et un hammam. A l'extérieur de celui-ci, on ne peut s'empêcher de remarquer des canaux qui servaient d'évacuation aux eaux sales du hammam. On distingue nettement au centre une étoile à 8 branches couvertes de mosaïques à l'époque. Cette dalle était alors entièrement recouverte de marbre.

Du haut des ruines de la citadelle byzantine qui se trouve au milieu du site, on a une belle vue sur la basse cour, point le plus faible du château et c'est par-là que les armées de Saladin ont vaincu la forteresse.

Je reprends mon sac auprès du gardien qui n'a toujours pas de monnaie vu le faible nombre de visiteurs et je commence la descente vers le lit de la rivière car le motard a oublié notre rendez-vous. Une fois à la rivière, je poursuis la route par une montée vraiment pénible. A mi-parcours, j'entends enfin la moto et son conducteur est fort étonné de me voir en train de marcher sous un soleil de plomb. Il me ramène au village et décide après moult négociations (un bel attroupement s'était formé autour de nous) de me faire cadeau du voyage. Je lui dis alors qu'il se rattrapera sûrement sur un autre touriste plus fortuné. Je trouve un minibus qui après plusieurs tours infructueux dans le village à la recherche de clients se décide à partir pour Lattaquié. Je refais alors le chemin en sens inverse puisque la station de bus pour Tartous est près de la gare où je suis arrivé ce matin. C'est alors que je décide de ne pas visiter le château de Marqab entre Lattaquié et Tartous pour directement retrouver cette ville qui sera mon point de départ pour rejoindre le Krak des chevaliers le lendemain.

Le bus arrive à Tartous peu avant 16h, ce qui me laisse le temps de choisir l'hôtel pour cette nuit. Aujourd'hui ce fut une journée sans touriste occidental mis à part 3 italiens et 4 français au château de Saladin. J'ai aussi l'impression que la côte ne vit pas au même rythme, à la même mode que le reste de la Syrie. Ici tous les gens ont une allure plus décontractée, plus occidentale, les filles portent des vêtements de couleurs très peu sont voilées, certaines d'entre elles sont maquillées. On pourrait se croire en Europe, je me demande c'est l'influence du Liban tout proche ou seulement le fait que Tartous comme Lattaquié sont les destinations de la classe aisée syrienne qui vient y passer un peu de bon temps l'été loin des chaleurs torrides du centre du pays.

Je finis par trouver un hôtel (Hôtel Raffoul) à budget raisonnable (150LS) pour une chambre. Son propriétaire, Karam, parle très bien français et tient l'épicerie juste au bas de l'hôtel, il me passe même son trousseau de clé pour rentrer dans l'hôtel, clés que je lui rends par le balcon de ma chambre. Mais je sens que quelque chose doit se passer en ville car tout est calme, beaucoup de magasins sont fermés et pourtant nous ne sommes pas vendredi, peu de monde dans les rues. Je trouve la réponse en allant me balader du côté du port.

Aujourd'hui semble être un jour spécial, voire férié car la promenade en bord de mer est très décorée et de nombreux cafés et attractions se sont installés sur le front de mer. Ce doit être la fête de la ville, je me demande même si la ville ne remercie pas Bachar. En tout cas, des policiers m'expliquent qu'une grande parade doit avoir lieu à 19h précise. Je me presse donc comme des centaines de personnes le bord de l'avenue près du podium où se tiennent des officiels pour assister à cette manifestation. Tout commence par deux portraits de la famille Hassad avec Bachar et Hafez suivi de quelques officiels de la ville en costumes sombres. Un syrien est chargé de faire applaudir la foule à leur passage, je reste stupéfait mais amusé. Après c'est une succession d'enfants de la ville qui défilent en brandissant des drapeaux syriens. Les personnes autour de moi sont très contentes car elles reconnaissent de temps à autre un membre de leur famille ou plus sûrement un ami. Après les enfants, ce sont des chars décorés qui sont de la partie, donnant à cette manifestation une allure de carnaval. Vers 20h le défilé s'achève et quelques minutes plus tard un très beau feu d'artifice est tiré dans le ciel étoilé de Tartous. Je reste bouche bée devant le spectacle, je n'aurais pas pu choisir meilleur moment pour séjourner dans cette charmante ville. Le coucher de soleil avec des bateaux à l'horizon était très joli.

Succombant par la suite aux terrasses en front de mer, ce n'est que fort tard que je rentre à l'hôtel.